Les mères toxiques
L’échange de signaux émotionnels entre le nourrisson et sa mère est à l’origine du sens crucial
d’être une personne qui a des sentiments, qu’elle peut communiquer à autrui. Avec une mère
toxique, les efforts que nous déployons pour influencer son point de vue échouent
constamment. Nous nous sentons ignorés, effacés, annihilés. Nous doutons de nous et de nos
sentiments. Nos signaux sont interprétés comme mauvais, méchants ou égoïstes. Nous vivons
dans un univers de honte où se faire remarquer revient à s’attirer critiques et sarcasmes.
Les enfants se posent un tas de questions afin de comprendre leurs expériences
interpersonnelles : la personne avec laquelle j’essaye de communiquer me comprend -elle ?
Qui est fiable ? qui m’offre chaleur, réconfort, et nourriture ? quel toucher, odeur et voix y
sont associés ? ces questions sont intimement liées à la survie.
Nous continuons d’être particulièrement vulnérables aux réactions de notre mère, même si
nous développons des liens très différents avec d’autres personnes qui nous voient et nous
découvrent autrement. Pour la majorité des parents et de leurs enfants, l’expérience
d’appartenance les uns aux autres a des hauts et des bas, mais malgré ces heurts et ces
accrocs, la relation est essentiellement réconfortante, rassurante et chaleureuse.
Et si on retirait plus de douleur que de réconfort et de plaisir d’une relation ? et si ces
expériences profondes de connexion et d’ancrage étaient si désagréables que nous sommes
limités et punis quand nous recherchons le réconfort et la sécurité ? et si nous devions nous
méfier de nous-mêmes, renoncer à nos propres désirs ou surveiller nos moindres faits et gestes
pour mériter le réconfort de la personne dont nous dépendons ? quand ce dilemme modèle
l’expérience que la fille ou le fils a de sa mère, j’utilise l’expression sans doute réductrice de
« mère toxique » pour désigner cette relation qui a de multiples facettes, et de nombreux
contextes et perspectives.
Extrait de « les mères toxiques »- TERRI APTER